En juin dernier je créai ce blog. Dans ma tribune initiale je précisai mes motivations. Au bout de quatre mois de cette toute première expérience dans le monde des blogs, c’est avec enthousiasme que je me suis tout naturellement décidé à poursuivre. Mon but, en faisant alors mieux connaître ce blog, est de susciter davantage d’interactions, voire de contributions. S'exprimer au village sur le village présente de fortes particularités et un grand attrait.
Il m’est en effet apparu palpitant, et intellectuellement stimulant, d’utiliser le prisme de la ruralité, de la vie dans un village, pour commenter à une fréquence hebdomadaire l’actualité et les sujets de société tels que par exemple le système scolaire, la place de la voiture dans notre mode de vie, la démocratie citoyenne, les incivilités au quotidien, le changement climatique, le communautarisme, l’opportunité pour un village de disposer d’un espace de coworking, etc.
L’intérêt de la démarche consiste principalement à éviter de retomber dans les propos généraux exprimés dans les médias qui nous entourent, pour mieux mettre en exergue la proximité de ces thèmes sociétaux avec notre réalité quotidienne au village, leur impact et les solutions possibles. Le village au sens large, et pas seulement le mien, Arthez de Béarn. Le blog ne prétend pas à l'exhaustivité sur chacun des sujets, ni à une qualité littéraire de premier rang ; en clair il ne vise ni le prix Pulitzer de journalisme, ni le Nobel de littérature. Pour autant, il y a suffisamment d’espace pour traiter des points d’intérêts majeurs et susciter le débat d’idées. C’est ainsi que je cite, en sous-titre de mon blog, Pascal Bruckner : "S'ouvrir à la pensée. La liberté n'est rien d'autre que cela : la richesse du paradoxe contre la sécheresse de la vérité".
Il me semble de fait que la cellule de base du territoire, comme l'est le village, n’est pas suffisamment considérée dans les analyses sur les sujets de société. Le regard de nos médias nationaux porte plutôt du haut vers le bas (“top down”) que de bas en haut (“bottom up”), et nous finissons par nous en satisfaire. Ayons foi dans la capacité naturelle du village pour apporter au débat d’idées de façon tout à fait originale et construire des solutions pragmatiques. Valorisons les initiatives locales qui visent à enrichir la réflexion dans les territoires : modestement des blogs comme celui-ci tout comme des blogs d’information territoriale, mais aussi l’organisation de conférences-débats dans les villages par exemple.
La déclinaison concrète, voire le point d’appui, de tribunes du blog au périmètre de son propre village est par ailleurs susceptible de générer des réactions contrastées que je qualifierais alors de “conservateurs” vs. “progressistes” pour en rester à un schéma simpliste de la nature humaine. Les premiers pourraient par exemple se lamenter : “de quoi se mêle-t-il ? ... l’équipe municipale est là pour gérer ces affaires ! … et puis s’il a quelque chose à dire, qu’il le dise de vive voix !”. Quand les seconds au contraire pourraient se réjouir, les sujets étant mis sur la place publique de façon transparente, de la pertinence et la puissance de ce moyen de communication leur permettant de participer, ne serait-ce qu’en lecture (voire plus si affinités et disponibilité), à des réflexions et à la recherche de solutions sur des points de leur vie au quotidien. “La lecture apporte à l’homme plénitude, le discours assurance et l’écriture exactitude” (Francis Bacon).
“oral” ou “écrit”, chacun de ces modes d’expression participe de toutes façons du droit d’expression le plus élémentaire, et se complètent utilement. Il faut néanmoins rappeler que, dans l’histoire de l’humanité, l’écriture a été régulièrement suspectée de menacer l’ordre existant. Platon rapportait déjà un mythe égyptien ancien en ce sens. De même la religion hindoue qui dans l’antiquité interdisait de réciter son livre sacré après avoir pratiqué des activités d’écriture. Etc. Aujourd´hui encore cette crainte de l’écrit reste incontestablement ancrée, plus ou moins consciemment, dans un certain nombre d’esprits conservateurs en situation de pouvoir, fût-il du plus modeste niveau. À l'échelle internationale, le classement de RSF sur la liberté de la presse est suffisamment explicite...
Pour en revenir à mon blog, ma motivation à le faire vivre sous un mode collectif est redoublée. Je souhaite qu’il contribue, à travers un angle sainement critique, à favoriser la rationalité, l'attitude sceptique et la pensée logique dans la recherche du mieux-vivre dans nos campagnes. Mon blog appartient aussi à tout celui qui souhaite décliner l’actualité et les sujets de société sous le prisme d’un village de campagne en général. Partageons nos points de vue et commentaires. Enrichissons-nous de nos expériences respectives. Sachons tirer profit des moyens modernes de communication pour encore mieux exercer notre responsabilité au sein de la cité. Remplissons le “réservoir à idées” et prenons plaisir à agiter ces idées en toute transparence !
Jean-Michel Cabanes