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57. le nez dans les poubelles

Alors ce n’était donc pas une blague ! À partir de ce mois d'avril, la collecte des ordures ménagères se fait tous les quinze jours au sein de notre communauté de communes, la CCLO, et par conséquent dans mon village, Arthez de Béarn, et non plus une fois par semaine. Quelques arguments de bon ton ont été avancés en vrac par les élus pour justifier cette évolution : impact écologique via la réduction de l'empreinte carbone, maîtrise des coûts avec baisse des taxes consécutive. 

Ainsi, dorénavant, nos poubelles conserveront-elles des déchets vieux de plus d’une semaine, ce qui n’est pas un gage de grande hygiène et ce qui altère donc inévitablement la qualité de vie d’un grand nombre des habitants de la CCLO.  À mon tour, mon “bon sens écoresponsable” (pour reprendre une auto-évaluation de la CCLO …) m'a amené à m’intéresser à ces argumentaires.

 

impact écologique

Je ne peux m'empêcher, avant toutes choses, de rappeler ce que ne cessent de répéter les leaders nationaux du mouvement écologiste : “être écologiste ce n’est pas prendre une douche par mois, à l’eau froide, et dans le noir !”. L’exigence de comportement vertueux envers notre environnement ne contraint pas à une vie d’ascète. À tout le moins, cette exigence ne doit pas nous priver d’un confort décent, et du respect de règles d’hygiène minimales. 

Or, sans aller mettre mon nez dans l’examen méticuleux de la diversité nauséabonde de nos déchets, le fait est que les périodes de fortes chaleurs auxquelles il nous faut dorénavant s’habituer, ne feront qu’accentuer dramatiquement cet inconfort olfactif. Et puis surtout, se pose un problème majeur d’hygiène. En effet, laisser encore plus de temps certains déchets dans un espace confiné, comme l’est un bac, renforcera significativement les conditions d'émergence d’une vie parasite microbienne dangereuse tant pour les habitants que pour le personnel de ramassage et le personnel d'entretien du matériel. 

Par ailleurs, face aux problèmes tant de volume de déchets ménagers que d'odeurs, et comme certains l’ont déjà pressenti, il est fort à prévoir “qu’à tous les déchets que l’on voit, hélas, sur les bords des routes ne viennent s’ajouter demain des sacs poubelles …”.

“Favoriser la réduction de 7% des émissions de CO2 de la CCLO” est donc une des motivations principales affichées pour justifier le changement de fréquence de la collecte des ordures ménagères. Certes, diminuer le nombre de rotations de camions aura un impact direct sur le volume de CO2 émis … mais de combien ? Et puis, a-t-on pris en compte le volume des émissions gazeuses supplémentaires, nauséabondes ou pas, de l'ensemble des déchets stockés une semaine de plus dans nos poubelles ?

Dans ce genre de challenge (“Favoriser la réduction de 7% des émissions de CO2 de la CCLO”), et pour une meilleure adhésion de la population, il serait opportun de quantifier, en toute transparence, l’ensemble des pistes retenues pour une telle réduction : quels sont les leviers majeurs qui contribueront à ce “7% de réduction” ? et quels sont leurs poids ? Car en réalité, pour mieux faire accepter les nuisances inhérentes à cette nouvelle politique de ramassage, reste à montrer qu’agir sur le nombre de tournées de camions de ramassage est vraiment déterminant pour atteindre cet objectif de “réduction de 7%”. Reste aussi à montrer qu’au niveau de la collectivité aucune autre piste du ressort de la CCLO n’a été négligée. À titre illustratif, a-t-on évalué l’économie de CO2 associée à une banalisation du télétravail et des réunions d’élus en distanciel ? Combien de kilomètres parcourus en voiture seraient ainsi économisés !

Dans cet esprit, réduire aussi la collecte à domicile des encombrants est-il d’ailleurs si vertueux d’un point de vue du CO2  ? Car pour une tournée économisée, combien de déplacements de particuliers en déchetterie, pour autant d’ailleurs qu’ils aient les moyens de transporter des encombrants comme des sommiers ou des gros électroménagers … l’économie de CO2 au niveau de la collectivité ne me parait pas si évidente.

 

maitrise des coûts

“Générer une baisse de la taxe d’enlèvement des ordures ménagères (TEOM)” est un argument qui ne laisse personne insensible. Pour autant, il resterait à avoir une idée de l’amplitude de la baisse pour mieux accepter les désagréments du changement de fréquence de la collecte. La TEOM sera-t-elle divisée par deux ? ou seulement de quelques pourcentages parce que le coût du traitement des déchets l’emporterait sur celui du ramassage ?

Mais, en réalité, l’arbre ne cacherait-il pas la forêt ? Selon les éléments communiqués par la CCLO (voir ci-dessous), la gestion des déchets représente 10,2 % de ses dépenses quand les “services généraux des administrations publiques locales” en représentent 42,4 %. Dit autrement, 42,4 % des impôts locaux affectés à la CCLO que nous payons n’ont pas un caractère productif explicite ! Sans autre explication, le volume de ce poste budgétaire me parait excessif. Bien au-delà me semble-t-il des niveaux observés ailleurs et qui déjà sont préoccupants. À l’évidence, des efforts de gestion ambitieux et, probablement, des décisions courageuses en matière d’organisation s’imposeraient pour réduire substantiellement ces dépenses de la CCLO, et conséquemment nos impôts. 

 

ne pas rater la cible

Les bénéfices du changement de fréquence de la collecte des ordures ménagères ne me paraissent pas si clairs que ça. Par contre, aucun doute sur les inconvénients et les risques en matière d’hygiène ! 

On ne peut malgré tout pas reprocher à nos élus de viser une baisse des coûts, et donc de nos impôts contributifs au fonctionnement de la CCLO. Toutefois, il se pourrait bien qu’il y ait des gisements de productivité bien plus importants à explorer au niveau des “services généraux des administrations publiques locales”, que de nous forcer à aller mettre nos nez dans les poubelles.



 

Jean-Michel Cabanes

 

 

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source : Le Mag CCLO février 2022 / budget

source : Le Mag CCLO février 2022 / budget

Tag(s) : #environnement, #gestion, #sécurité, #économie locale, #transparence
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