“Volèm viure al país”, une revendication des années ‘70 plus que jamais remise au goût du jour, en ces temps de confinement. Pour beaucoup, il s’agit de fuir les affres de la vie dans les grandes métropoles et de se plonger dans un environnement à taille plus humaine, en province. Voilà donc une opportunité de dynamiser des villages de campagne comme le mien Arthez de Béarn, avec ses 1900 âmes, en profitant de cet “exode à rebours”. Ainsi est-il opportun de s’interroger aujourd'hui sur les critères de différenciation qui, dans l’absolu, pourraient faire préférer de vivre dans tel ou tel village.
Autant ne pas s’y attarder davantage, mais il ne me semble pas que le niveau d’équipement en infrastructures soit un critère de différenciation. En effet, durant les dernières décennies, la plupart des villages de cette taille ont investi dans de telles infrastructures comme écoles, salle polyvalente, gymnase, piscine, avec plus ou moins d’opportunité financière (lire ma tribune un rapport clé pour le village). En revanche, la pérennité de ces installations sur le moyen/long terme est bien sujette à leur taux d’utilisation, et il est donc vital pour ces villages d’être le plus attrayant possible pour les jeunes populations qui cherchent à s’installer.
Il en va de même, dans une certaine mesure du niveau des services disponibles au village, tels que services de santé (médecins, infirmiers, etc.), alimentation (qui n’a pas encore sa supérette ?...). Sont-ils des critères de différenciation entre villages ? Je ne le crois pas.
Sur le court/moyen terme, il se pourrait bien par contre que le niveau de connectivité internet (fibre, 5G) du village soit un vrai critère de choix pour satisfaire au mieux les exigences des télétravailleurs à distance (lire par exemple le rapport le retour des diplômés en Béarn sur mon kiosque). Pour mieux positionner d'entrée notre village dans cette perspective, il devient donc de plus en plus urgent d’engager un projet d’espace de “coworking” dit aussi “tiers-lieu” (lire ma tribune des bureaux au village... le temps est venu !), tout en insistant pour une arrivée au plus tôt de la fibre au village.
Qu'est ce qui fait donc l’attrait d’un village ? Qu'est ce qui fait la différence entre villages ?
La réponse ne me semble donc pas relever du registre matériel, tangible, mais plutôt de l’immatériel, de l’impalpable, de ce que l’on pourrait nommer “culture de village” dès lors que des valeurs et une ambition communes prennent racine au sein de la collectivité (lire ma tribune de la culture de village).
Face à un tel enjeu, le leadership des élus locaux est évidemment un facteur-clé de succès. À titre illustratif, me vient à l’esprit ce maire qui, à l’occasion d’un reportage sur les nouvelles pratiques de présentation des vœux de bonne année dans le contexte de la pandémie, précisait que le rôle du maire était bien “d’apporter de la joie et de la positivité au sein de ses administrés"... Que dire, à l’inverse, de situations locales comme celle où un couple de personnes âgées me faisait part de son étonnement de ne pas avoir reçu cette année de courrier du maire pour les vœux comme le faisait son prédécesseur par un geste d'estime tout simple... (lire ma tribune la pyramide de Maslow au village).
Le leadership des élus en responsabilité est déterminant pour la qualité du lien social au sein du village. Ainsi en va-t-il de la capacité de ces élus à fédérer, réunir autour de causes ou projets pour lesquels chacun au sein de la collectivité y conforterait un sentiment d’appartenance, et y trouverait un motif d’accomplissement (lire ma tribune la pyramide de Maslow au village). Les exemples de thèmes pouvant impliquer une collectivité et générer une légitime fierté ne manquent pourtant pas : protection de l’environnement (lire mes tribunes urgence climatique ? ... au village ??? ; moutons, le retour ; au clair de la lune), civisme (lire ma tribune au p'tit village, l'incivilité qui rampe), identité et charme du village (lire ma tribune mon village drive-in), éducation (lire ma tribune pour un village qui fasse école). Encore faut-il savoir et vouloir structurer de tels projets, les piloter, puis animer, motiver, à la hauteur des enjeux.
Mais ce qui m'apparaît encore plus de nos jours comme un élément majeur de réputation, d’attrait, est bien la pratique de la citoyenneté au sein du village (lire mes tribunes ce siècle a déjà vingt ans ; la corrida, un forum citoyen de référence ; la démocratie et l'organisation de la diversité) et, à ce titre, le degré de maturité de l’équipe municipale dans ses capacités de communication loin de tout infantilisme.
Volèm viure al país, on veut vivre au pays. Le combat qu’illustrait ce slogan dans les années ‘70 semble aboutir 50 ans plus tard ! Certes les contextes et les motivations ne sont pas comparables, mais le résultat est là. Le bouleversement sociétal déclenché par la tragédie sanitaire et les progrès de la technologie numérique, a ainsi permis de revisiter notre système de valeurs. La structure locale de village semble répondre aux attentes d’un grand nombre de nos concitoyens. Accueillir ces nouveaux candidats à l’exode rural à rebours est un enjeu vital à moyen/long terme pour nos villages. L’enthousiasme qui pourra émaner de ces collectivités au quotidien sera très probablement un élément de choix pour nos concitoyens à la recherche de valeurs.
Jean-Michel Cabanes
Mans de Breïsh - Volèm viure al païs
Album : Volèm Viure Al PaïsLabel : VentadornAnnée : 1975"Nòstra tèrra crèbaVenduda al poder de l'aur.Mas lo punh se brandís,Lo crit s'espandísVolèm viure al ...